mercredi 22 décembre 2010

Lettre à Grand-Mère (une histoire brodée de toutes pièces)

L'inconnue de Grand-Mère habite près de la rivière St-Maurice
La grand-mère est une figure centrale de l'enfance. L'une des deux miennes était culottière à Hérisson. Germaine Auclair. Elle cousait les pantalons que Monsieur Vénuat, tailleur du village, lui commandait. Puis, pour combler le temps et étancher sa foi, ma grand-mère était bonne du curé. Ma grand-mère et son mari habitaient rue de l'Enfer. Vous liriez ceci dans un roman que vous pousseriez des Ho et des Han réprobateurs. C'est pourquoi il est bien plus jouissif, parfois, de raconter sa vie que d'en inventer une. Préférable, alors, de fabriquer une vie d'inventions, une vraie vie, aussi réelle qu'inventée. Mes souvenirs de ma grand-mère sont presque toujours reliés à sa machine à coudre Singer qu'elle actionnait avec autant d'application, de force que de frénésie et d'entrain. Les pièces qu'elle confectionnait avaient toute une histoire : Un mariage, un baptème, un enterrement et autour de ces évenements, des gens, des familles, des anecdotes parfois chuchottées en messes basses dans la grande pièce que nous appelions le taudis. Je me mettais alors dans un coin et je l'écoutais. Lorsqu'elle avait terminé de tailler une pièce de tissus j'avais le droit de récupérer certains morceaux. Enfin, lorsqu'elle passait à la planche à repasser j'étais autorisée à monter sur son petit banc de couturière et de m'affubler avec les ramendos de tissus en m'époumonant une histoire de princesse ou de maitresse d'école selon l'humeur et l'inspiration du moment. Lorsqu'il s'agissait d'être une princesse je terminait en fonçant au château. Je montais la pente caillouteuse en tenant mes nippes à deux mains. Là, dans les ruines merveilleuses j'achevais l'épopée près du coffre aux trésors. Je cachais un morceaux de ma parure en formant un voeu magique. C'est cet univers que je vais retrouver les 7, 8 et 9 janvier lors de mon passage à Hérisson dans l'allier au centre exact de la France. C'est cet univers que je porte en moi lorsque mes doigts composent et alignent des mots en phrases. Alors c'est franchement bien évident : L'inconnue que j'ai choisi habite Grand-Mère près de Shawinigan. Et par fidèlité à mes débuts dans ce projet insensé, l'inconnue de Grand-Mère habite au bord de l'eau, près du pont de Grand-Mère qui enjambe la rivière Saint-Maurice. Lettre (à Carmen) suit...

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